Julie Romagon, chargée de projet

Julie Romagon est une ancienne étudiante du M2 Santé, Migrations, Médiations. Elle nous raconte son parcours qui l'a menée jusqu'au Canada.

Pouvez-vous vous présenter rapidement et décrire votre poste actuel ?

Je m’appelle Julie Romagon, j’ai 25 ans. J’ai suivi des études en anthropologie sociale, et je me suis spécialisée en anthropologie de la santé. A la suite de mes études, j’ai travaillée pendant presque deux ans en tant que chargée d’études à l’École des hautes études en santé publique, sur les thématiques d’urbanisme, aménagement et santé. Plus précisément, j’ai participé à des démarches d’évaluation d’impact sur la santé (estimer en amont les impacts de projets, politiques non sanitaires sur la santé pour minimiser les effets négatifs et maximiser les effets positifs), j’ai aussi participé à un projet d’évaluation de politiques, et à un projet sur l’intégration de la santé dans les projets d’aménagement. J’ai déménagé au Canada à l’automne 2018 où je vais travailler pendant quelques mois sur des nouvelles thématiques en lien avec l’intégration et l’adaptation des femmes réfugiées et immigrantes au Québec.

Le choix du CURSUS

Pouvez-vous nous parler de votre cursus avant la formation précisée ci-dessus ?

J’aimais beaucoup mes cours de philosophie au lycée mais il manquait un ancrage auprès des gens. Des livres d’anthropologie traînaient à la bibliothèque de mon lycée et je me suis dit « tiens c’est quoi l’anthropologie ? » En cherchant ça n’était pas clair mais j’ai choisi ça quand même. J’ai entamé une formation en anthropologie en 2011, à la suite de mon Baccalauréat. Il existait un parcours en anthropologie dès la première année de licence à l’Université Lumière Lyon 2. J’ai choisi ce cursus.

En troisième année de Licence, j’ai fait un échange universitaire au Canada, à Lakehead University, à Thunder Bay, où j’ai été sensibilisée à une approche plus anglo-saxonne de la discipline. J’ai également pris des cours en lien avec les Indigenous studies (études autochtones) qui m’ont beaucoup fait réfléchir sur l’anthropologie et sur ses méthodes.

Et après la formation ?

J’ai commencé directement à travailler. 

Ancien(ne) diplômé(e) de l’université de Bordeaux, quelles étaient vos raisons d’opter pour un tel cursus ?

Dès ma première année de licence, j’ai été fascinée par les questions d’anthropologie du corps, de la santé etc.  J’avais également envie d’un cursus professionnel car je n’étais pas sûre de vouloir rester à l’université pour un doctorat. En France, le seul master professionnel dans le domaine de l’anthropologie de la santé que j’avais trouvé était à Bordeaux. Pendant mon année au Canada, j’ai  également approfondie mon intérêt pour les questions d’anthropologie de la santé sur certaines thématiques spécifiques au Canada. Donc en rentrant en France, tout naturellement, mon choix s’est porté sur ce programme. Mon objectif était d’obtenir un diplôme spécialisé en anthropologie de la santé qui me donne des clefs pour travailler en dehors de l’université. Je voulais trouver un travail qui me permette d’utiliser l’anthropologie à des fins concrètes.

Ce master m’a donné beaucoup à réfléchir, sur tous les facteurs qui peuvent influencer la santé des gens (et pas seulement la culture et les comportements individuels, comme on peut l’entendre parfois). C’est vraiment une approche que j’utilise au quotidien dans mon travail.

L’EXPERIENCE PROFESSIONNELLE

Pouvez-vous nous raconter vos premières expériences professionnelles à la sortie de la formation ?

Ma première expérience, c’était mon stage de fin d’études où j’ai été engagée à Bordeaux Métropole pour participer à une évaluation d’impact sur la santé. C’était 5 mois, j’ai travaillé dans une équipe de 9 personnes issues de secteurs différents. Après mon stage, j’ai écrit mon mémoire et quelques semaines après j’ai commencé mon travail à l’EHESP, dans la continuité. Mon positionnement était plus « recherche », et j’ai travaillé avec plusieurs collègues de disciplines différentes. J’ai d’abord fait un gros travail de revue de littérature scientifique pour une évaluation d’impact sur la santé, puis j’ai participé à une évaluation de politique. J’ai fini par travailler sur un projet avec des professionnels de l’aménagement, mes missions correspondaient plus à de la gestion et animation de projet. 

Pourquoi avoir décidé(e) de vous orienter vers votre poste actuel ? Quel a été l’élément déclencheur ?

Pour l’EHESP : Ma future responsable, rencontrée pendant mon stage, m’a proposé un emploi qui commençait peu de temps après la validation de mon diplôme. Je connaissais un peu le sujet, et l’EHESP ça me semblait être un super premier travail dans mon domaine, avec un pied dans la recherche mais en réponse à des demandes d’organismes externes.

Au Canada : après deux ans de travail sur l’urbanisme et la santé, j’avais envie de travailler sur des nouvelles thématiques, pas seulement des politiques publiques, mais plus proches des besoins immédiats des gens.

Comment avez-vous fait pour trouver votre emploi actuel ?

J’ai trouvé mon emploi à l’EHESP grâce à mon stage. Pour mon emploi au Canada, j’ai répondu à une offre, avec l’aide d’une conseillère en emploi au Québec. Je suis allée à l’entretien… et j’ai eu le poste !

En quoi votre diplôme en Anthropologie a constitué un atout pour obtenir un tel poste ?

Je ne sais pas si c’était l’anthropologie, la chance ou le timing qui ont été des déclencheurs pour mon emploi à l’EHESP, ou les trois.Ma responsable, médecin de santé publique, avait étudié l’anthropologie à Bordeaux, et travaillé avec ma directrice de mémoire auparavant. Je pense que ça a beaucoup aidé. L’équipe à l’EHESP se voulait aussi pluridisciplinaire et cherchait à avoir quelqu’un issu des sciences sociales. J’avais une première connaissance des démarches sur lesquelles l’équipe travaillait (grâce à mon stage) et j’avais étudié en anthropologie, je pense que ça a constitué un atout pour obtenir le poste. Pour mon emploi au Canada, mon master m’a donné des connaissances très pertinentes sur le sujet du projet et j’ai pu en parler pendant l’entretien. Ma responsable a également une sensibilité en sciences humaines, particulièrement en anthropologie. Je pense que ça a joué. 

Qu’est-ce qui vous passionne dans le métier que vous exercez ?

Ce sont les pratiques et savoirs professionnels. C’est large mais ça me permet de trouver un intérêt dans beaucoup de chose. Mon travail à l’EHESP me permettait d’avoir un regard sur comment les collectivités territoriales, les agences de santé, les professionnels de l’urbanisme et de l’aménagement prenaient en compte la question du lien entre santé et urbanisme. Mais pour comprendre pourquoi cette question est prise en compte ou non, il fallait comprendre ce qu’était le travail de ces acteurs. Ce qui m’a plu aussi, c’est que j’ai pu me poser ces mêmes questions sur les acteurs et chercheurs de santé publique. C’est de la déformation...universitaire ! 

En quoi la formation répond-elle aux attentes nécessaires à l’exercice de l’emploi ?

Le Master donne des connaissances variées sur des questions de santé, de santé publique et de migrations. Mais ce n’est pas la seule discipline qui travaille dans ces champs. Il y a aussi la sociologie, la géographie, les sciences politiques etc., il faut savoir se démarquer. Ce que l’anthropologie m’a apporté, c’est surtout d’apprendre à poser des questions autrement, et de questionner certaines choses parfois prises pour acquises. Par exemple, si on veut changer les pratiques des acteurs de l’aménagement, c’est d’abord intéressant de se demander « c’est quoi la santé pour les acteurs de l’aménagement ? » mais aussi « c’est quoi l’aménagement pour les acteurs de la santé publique ? ». C’est simple, mais des fois c’est vraiment riche de prendre le temps de se réfléchir à ces questions.

Pour mon nouveau travail, l’anthropologie est utile aussi pour nuancer l’influence du facteur « culturel » dans la vie des femmes réfugiées et immigrantes au Québec. C’est un facteur qui va influencer leur intégration certes, mais il y en a plein d’autres issus du pays d’accueil qui sont tout aussi, voire plus, importants. Et c’est vraiment quelque chose que j’ai appris en master, cette approche un peu plus globale, qui permet de questionner plein de facteurs (économiques, politiques, etc.), et pas simplement la culture des gens.

Quelles sont selon vous les compétences essentielles et requises pour exercer ces fonctions ?

Pour travailler sur des projets en santé publique, il faut être capable de travailler avec des acteurs d’autres disciplines, qui ont des connaissances et expertises sur certains sujets que les anthropologues n’ont pas. Donc savoir travailler avec d’autres secteurs sans imposer son approche et sa méthodologie mais avoir quand même une vrai place dans le projet (pas juste une caution sciences sociales). C’est dur à négocier mais c’est pour moi la compétence la plus importante. Il faut aussi avoir quelques notions de gestion de projet, une certaine flexibilité, savoir gérer les imprévus et l’inconnu. Ça paraît simple et facile, mais ce n’est qu’une fois dans un projet un peu complexe qu’on se rend compte si on est capable de gérer ces imprévus.

LES PERSPECTIVES

Comment vous vous voyez dans 5 ans, dans 10 ans ?

J’hésite encore à commencer une thèse. J’ai envie de travailler sur différents projets en dehors du monde académique, pour pouvoir quand même faire quelque chose après la thèse si je ne peux pas travailler à l’université. J’aimerais enseigner. Je reste ouverte à cette possibilité, sachant qu’au Canada il y a des lieux en dehors de l’université où l’on peut enseigner les sciences sociales.

Sinon, je crois que dans 10 ans, je travaillerai sur des sujets en lien avec la santé ou l’environnement. Les problématiques de santé environnementales ne sont pas prêtes de disparaître.

Au regard du recul qui est le vôtre, quels conseils pourriez-vous donner aux jeunes diplômés de cette formation à l’université de Bordeaux ? 

Si vous ne voulez vraiment pas travailler dans la recherche, essayez de trouver un stage qui soit professionnel, en associations, en collectivité, etc. Ne mettez pas « stagiaire » sur votre CV, mettez « chargé d’études » ou « chargé de projet ». Vous avez fait quelque chose qui compte. Stagiaire c’est un statut, ça ne veut pas dire que vous n’avez pas une véritable expérience professionnelle.

C’est parfois difficile de traduire l’anthropologie en compétences reconnues sur le marché du travail. Recherchez des offres d’emploi en lien avec les sciences sociales, étudiez le vocabulaire du domaine qui vous intéresse (association de promotion de la santé, collectivité, bureau d’études etc.) et voyez si finalement leurs attentes ne sont pas des choses que vous savez faire, mais que vous appeliez autrement.

Est-ce que vous avez une anecdote à raconter ?

On m’a souvent dit « ah oui l’anthropologie, c’est ci ou c’est ça »… et souvent c’était un peu cliché.  Mais la meilleure chose que j’ai entendu, c’est quelqu’un de ma famille confondre ethnologie avec œnologie. Ça m'a beaucoup fait rire. Sinon, une fois on m’a demandé « l’anthropologie c’est l’étude des insectes ou un truc comme ça ? »

ACTVITÉ PROFESSIONNELLE

1er et principal employeur : École des hautes études en santé publique

Lieu : Rennes, France

Date d’embauche : 14 novembre 2016 (jusqu’à fin septembre 2018)

Poste : Chargée d’études

Au Canada              

Employeur : Table de concertation des organismes au service des personnes réfugiées et immigrantes (TCRI)

Lieu : Montréal, Canada

Date d’embauche : 19 novembre 2018 (jusqu’au 15 février, potentielle prolongation au printemps)

Poste : Chargée de projet

DERNIER DIPLÔME

Master en Anthropologie sociale, ethnologie – Spécialité professionnelle Santé, Migrations, Médiations obtenu en 2016 à l'Université de Bordeaux.

Mise à jour le 29/05/2019

Julie Romagon
Chargée de projet

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