18 Mars 2020 – Projection-débat: Monsieur Deligny, vagabond efficace

20 h15 Cinéma Utopia, Bordeaux

Richard COPANS - documentaire France 2019 1h35mn - avec les voix de Jean-Pierre Darroussin, Mathieu Amalric, Sarah Adler...

Du 18/03/20 au 23/03/20

La rencontre entre Fernand Deligny, éducateur spécialisé devenu pédagogue novateur et respecté de tous, et Richard Copans, grand directeur de la photographie devenu un des plus importants documentaristes français, remonte à 1974.
Richard Copans, jeune cinéaste militant membre du collectif Ciné Lutte, vient filmer dans les Cévennes une de ces oasis que Fernand Deligny a créés pour de jeunes autistes : loin de l'enfermement asilaire ordinairement pratiqué, ceux-ci évoluent librement au cœur de la nature. En fait Copans ne filme pas grand chose mais guide le travail de Renaud Victor, un jeune cinéaste autodidacte proche de Deligny qui réalisera Ce Gamin, là, film emblématique sur le travail du pédagogue. 15 ans plus tard, Richard Copans produira d'ailleurs un autre documentaire de Renaud Victor sur Deligny.
Il y a quelques années, Richard Copans retrouve un couple d'éducateurs qui vivent toujours dans les Cévennes, avec les mêmes autistes qui ont vieilli en même temps qu'eux… 45 ans de compagnonnage devaient tout naturellement aboutir à un film et le voici, passionnant : Monsieur Deligny, vagabond efficace, qui débute par une très belle séquence tournée au cœur du lieu d'accueil, au moment du lever et du petit déjeuner : les pensionnaires autistes s'affairent efficacement, dans un ballet parfaitement coordonné, et semblent pouvoir aisément se passer des soignants. La scène dégage une impression magnifique de sérénité, à 20000 lieues des clichés psychiatriques.
Puis nous revenons 80 ans en arrière, en 1938 : Fernand Deligny est instituteur dans l'immense unité psychiatrique d'Armentières dans le Nord, où l'enfermement et la médicalisation à outrance des jeunes autistes sont de mise. Le jeune instit va faire exploser ce carcan avec la complicité de quelques infirmiers et proposer activités sportives et culturelles à ces enfants qu'on dit perdus. Il quittera plus tard l'institution pour suivre à Lille, au sein de la Sauvegarde, des jeunes délinquants au passé déjà lourd dont il s'empresse de brûler le dossier judiciaire et médical, pour repartir à zéro… Peu après Deligny crée un peu partout en France des lieux d'accueil à la campagne pour ces jeunes gens perdus, à travers l'institution de La Grande Cordée. C'est à cette période que François Truffaut rédige son scénario des 400 coups autour du personnage très autobiographique d'Antoine Doinel. Truffaut, dont l'adolescence fut pour le moins agités, connaît et respecte Deligny, qui va contribuer notamment à l'écriture de la scène finale du film. Dès lors Deligny va mettre le cinéma au cœur de sa pédagogie et de sa thérapie. Il acquiert une caméra et va tourner avec ses pensionnaires, les initiant à l'image, les amenant à jouer et à se mettre en scène. De ce travail naîtra au moins un film diffusé en salle : Le Moindre geste, 1971.
Le film merveilleux de Richard Copans croise archives, lectures de textes éclairants de Deligny par l'excellent Jean-Pierre Darroussin, et extraits de ces films qui restent dans l'histoire du cinéma comme la trace du travail extraordinaire de cet homme trop peu connu.

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